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Le sacerdoce du célibataire

Ils sont 6 millions en France. Dans les années 80, ils se croyaient libérés. Aujourd'hui, retour aux valeurs oblige, ils se sentent isolés. Enquête chez les solitaires qui ne voudraient plus l'être.

 

«Un mec, pour quoi faire?» demandaient, dans l'euphorie, les femmes libérées des années 80. «L'indépendance se portait alors en bannière, avec la réussite professionnelle», se rappelle Jean-Pierre Cantorné, directeur des études et de la recherche à l'agence FCB. La décennie 90, elle, joue profil bas. Hommes et femmes n'ont qu'une idée: se caser. Mais où sont donc passés les «célibattants»? Alors qu'on recense aujourd'hui 6 millions de solitaires, à temps partiel ou à temps complet, par obligation ou par conviction. Près de 8 millions, si l'on compte les familles monoparentales. Et la tendance ne fait que s'accentuer. Les divorces se multiplient, les foyers éclatent. Conséquence: le nombre des solos va crescendo...
Odile Lamourère, créatrice du Salon des célibataires - qui, les 19 et 20 mars, fêtera à Paris sa 7e édition - espère bien cette année redoper le moral des troupes. «Les célibataires, ce sont les mal-aimés de notre société», affirme-t-elle. Paranos, les solos? Les faits sont là. Qui verse le plus lourd tribut aux impôts? Qui paie les vacances au prix fort, pour cause de supplément «single»? Les cafetières deux tasses Philips, les minimachines à laver Kenwood, les petits plats individuels Findus ne suffisent pas à effacer les états d'âme... Amorce d'un courant favorable? En avril sera lancée la première Croisière des célibataires. En tout bien tout honneur. Son organisateur: l'Espace voyages Côte d'Azur, qui propose, au départ de Nice, une virée de cinq jours, via Capri, Taormina et Lipari. Conférences, débats et soirées dansantes à l'appui. «L'idée est née simplement, explique Christian Quiquerez, son initiateur. Il existe des lieux où se rencontrent les jeunes et le troisième âge. Entre les deux: le néant.» Que reste-t-il si l'on ne possède ni le savoir-faire d'un nightclubber ni le goût des agences matrimoniales, classées X?... Le groupe Lucien Barrière pourrait bien, lui aussi, entrer dans la danse des esseulés, avec une formule de week-end prolongé à Cannes. Thalasso, excursion, soirées casino et karaoké. Car il n'existe qu'un moyen pour faire sortir les ermites de leur tanière: l' «éclate», comme l'explique Didier Audebert, rédacteur en chef de «Tête à tête», le nouveau - et unique - magazine du «célibat dans tous ses états». Ni intello ni Minitel rose, plutôt tendance bons plans et carnet d'adresses bétonné, «Tête à tête» organise même des fêtes, comme celle de la Saint-Valentin, qui a réuni 2 000 personnes à la Locomotive. Conformément à la «ligne éditoriale» du journal: dédramatiser, pour éviter les ghettos...
Ghetto, le mot est prononcé. «Avec la crise, le sida, le cocooning, les années 90 marquent le retour aux valeurs, la famille et le couple», note Jean-Pierre Cantorné. Résultat: les célibataires culpabilisent et rentrent dans leur coquille. Une chose est sûre: ils dérangent. L'actuelle campagne publicitaire Bolino est exemplaire. Les spots télévisés mettent en scène une femme pressée, un PDG affairé, un gamin captivé par sa console électronique, à grand renfort de riz à l'espagnole et de hachis Parmentier. Nulle allusion à la vie en solo. «Parce que ces repas sur le pouce s'adressent à tout le monde», plaide Cécile Pichou, chef de produit. Peut-être aussi parce que le célibat renvoie l'image de la solitude et que la solitude ne fait pas vendre... Lors du Salon, Odile Lamourère essaiera donc, malgré tout, de regonfler les coeurs. Les exposants: des clubs de loisirs et des conseillers en tout genre - du look au développement personnel - en passant par l'association Aides et des groupes de défense des droits des célibataires... Sont aussi programmés des conférences-débats et des jeux pour faire sourire les plus récalcitrants. En conclusion, une grande fête. Cela s'impose.

Salon des célibataires, hôtel Ambassador, 16, bd Haussmann, Paris-IXe. Rens.: 36.15, Celib. La Croisière des célibataires, 21-25 avril, tél.: (16) 93.16.04.30.